Pour créer, il s’inspire de ses nombreux voyages!
Céline Gobert
21 mars 2017
Carrière
5 minutes à lire
358
Ancien d’Eidos et de Gameloft, c’est un tour du monde d’Australie à Singapour et Bali, en passant par des villes comme Berlin et Shanghai, qui a insufflé les plus grandes inspirations à cet artiste de 34 ans!
Yohann Schepacz est artiste concept et directeur artistique. Depuis novembre dernier, lui et sa femme Li Yan ont mené pas moins de 6 à 8 projets différents dans la firme qu’ils ont lancée: Oxan Studio. Parmi ses clients, on compte notamment Activision, Riot Games, Bethesda, Warner Bros Montreal, Ubisoft Québec, et Eidos Montreal.
Originaire de Toulouse, en France, ville qu’il a quittée à l’âge de 22 ans après des études dans une école de multimédia et d’infographie, il a ensuite appris sa technique «sur le tas» et s’inspire aujourd’hui de ses nombreux voyages pour créer.
En 2012, il a ainsi rejoint le studio Eidos à Montréal après avoir passé 3 ans en Australie, et voyagé dans de nombreux pays. En parallèle, il travaille sur Tinkiet, un projet personnel, sorte de manuscrit « fourre-tout » d’expression personnelle où il explore des visuels, des graphismes divers et des notes écrites.
Espresso-Jobs : Comment est né Oxan Studio?
Yohann Schepacz: Nous avons eu l’idée avec ma femme Li Yan. C’est la cristallisation de notre relation personnelle et professionnelle. Le nom vient de la contraction de nos deux noms, nous nous sommes tous les deux fait tatouer le logo. La compagnie a officiellement été lancée en 2016. Nous sommes deux, mais on travaille avec 6 - 7 contractuels, on travaille en fonction des besoins et des indications des clients.
Quel est votre travail?
On leur offre des solutions visuelles et on développe des projets pour l’industrie des films, des jeux vidéo et des médias imprimés. On fait aussi des jeux de cartes, des jeux de société, des couvertures de livres. On travaille à résoudre le problème des clients et on leur trouve des solutions visuelles adéquates et attrayantes. On fait aussi beaucoup de développement de propriété intellectuelle pour des compagnies. On crée tout l’univers, les personnages, l’endroit, les environnements, les machines. On définit les codes visuels. Notre travail se déroule en amont de l’écriture. On discute beaucoup avec les clients, il y a beaucoup de va-et-vient, on va pousser la direction artistique, le résultat est un melting pot de notre propre vision et de la demande du client.
Quels sont vos outils de travail? Quel est votre style?
Mon travail est à 90% digital. Je travaille avec Photoshop et des logiciels comme Zbrush ou Maya. Je dessine à la main sur Photoshop, parfois sur un Sketchbook mais je l’ai remplacé par un iPad pro où je travaille sur une excellente application « Procreate ». Mon style est réaliste, figuratif, avec un «feeling» traditionnel, j’aime que les choses aient l’air d’avoir été peintes à la main. Que ce soit dans les textures, les environnements, les lumières, je crée des choses plausibles pour la plupart des gens.
D’où tirez-vous votre inspiration?
Je tire mon inspiration du projet en lui-même et des directives reçues mais aussi des recherches Google, Pinterest, ou de ce genre de sites qui rassemblent des milliers de références visuelles. Je regarde ce qui a été fait pour mieux m’en détacher et apporter quelque chose de nouveau. Je fais du neuf avec du vieux. Je suis inspiré aussi par les romans d’aventure que j’ai lus, les voyages que j’ai faits. L’exploration d’espaces, les découvertes sensorielles permettent de ressentir une immersivité que je peux utiliser par la suite. J’utilise beaucoup de photos que j’ai prises pendant mes voyages. Il faut aller à la rencontre des gens, des endroits, des coïncidences, et créer le plus de situations possibles, le plus d’opportunités possibles auxquelles on n’avait pas pensé. Enfin, dans le voyages, il y a des visuels qui s’impriment dans le cerveau et que l’on a envie de réutiliser quelque part.
Quels sont les vôtres?
Au Cambodge, je me souviens d’avoir été seul parmi les ruines. À Bali, ils ont une culture visuellement fascinante. J’ai fait un road trip au Vietnam, on y voyait des temples accrochés aux falaises, des panoramas incroyables, avec d’anciens volcans, des villages perdus sur les rochers. J’ai vu des tornades, des grottes mexicaines, j’ai fait de la plongée en apnée. Shanghai ressemble au film Blade Runner, il y a des tours où tu peux voir des buildings à l’infini, comme si la ville n’avait pas de fin. Avec le brouillard de la pollution, c’est assez bizarre.
Quelles sont les qualités essentielles à votre métier?
Il faut être capable d’amener des idées originales et d’apporter le plus de trucs cools possibles pour que l’idée du client puisse ensuite se vendre et qu’il obtienne des budgets. En plus du défi technique d’arriver à peindre de mieux en mieux, il faut arriver à se renouveler. Mais plus on devient meilleur en technique, plus on peut avoir des enjeux créatifs élevés. Il y a une énorme compétition dans ce milieu, il faut faire mieux que le voisin : des choses plus fraîches, des designs plus originaux - tout en restant pertinent pour satisfaire et surprendre le client. C’est un stress quotidien. Mais on finit par développer des méthodes de travail satisfaisantes et ça devient une routine.
Quels conseils donneriez-vous à quelqu’un qui débute?
Il faut passer par un cursus qui lui permet de toucher à tout. Une école, une formation permet de trouver la discipline qui nous plaît vraiment. Attraper la passion pour le travail, c’est quelque chose qui ne s’explique pas. Pour moi, c’est une maladie, une obsession. C’est ça qui va faire que l’on passe 10 000 heures à travailler sur quelque chose et qu’on ne lâche pas. Personnellement, c’est la chose qui me procure le plus de plaisir dans la vie. Il faut aimer le processus d’échec aussi. Échouer, c’est 90% du temps d’un processus créatif, il faut rebondir, faire preuve de résilience, faire face à l’adversité et aller de l’avant. C’est un processus d’itération, de répétition et d’analyse. Si l’on est incapable d’apprécier ce travail-là, dès le départ, ça va être difficile. Je dirais enfin que c’est important pour sa santé mentale d’avoir un projet à côté où on se fait plaisir sans quelqu’un qui te dit quoi faire. Et de ne pas hésiter à prendre des risques! Surtout en début de carrière. Il est plus important de se lancer de grands défis que d’aller chercher la sécurité financière d’un travail stable.
Nom du studio: Oxan Studio Lieu: Montréal Activité: Concept design, illustration, créations d’univers. Créations : Concept art pour Deus Ex Manking Divided (Eidos), Horizon Zero Dawn, Rise of the Tomb Raider, Independence Day Resurgence. Noms des principaux dirigeants: Yohann Schepacz et Li Yan |
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